Cet article vise à résumer un jugement rendu par la Cour supérieure du Québec, district de Longueuil en 2017 concernant une demande en exception déclinatoire fondée sur une clause d’arbitrage dans le Contrat de commission (7847866 Canada inc. c. Gree Electric Appliances Inc. of Zhuhai, 2017 QCCS 1723). Le contrat accorde à la demanderesse la distribution exclusive de produits de climatisation de la défenderesse pour l’ensemble du Canada avec utilisation de la marque de commerce « Gree », qui est bien connue en Chine comme « 格力电器 ».
Cette décision nous rappelle que 1) en employant le verbe « renvoyer » à l’article 622 du Code de procédure civile du Québec (ci-après « C.p.c. »), le législateur du Québec a signalé que le tribunal n’a aucun pouvoir discrétionnaire de refuser de renvoyer l’affaire à l’arbitrage à la demande de l’une des parties, lorsque les conditions requises sont remplies ; 2) une clause d’arbitrage est une clause compromissoire parfaite, lorsque la clause prévoit que les parties s’obligent à l’avance à soumettre à l’arbitrage les litiges qui pourraient naître relativement à leur contrat et implique que la sentence rendue sera finale et liera les parties (Zodiak International c. Polish People’s Republic, [1983] 1 RCS 529).
Les faits pertinents
Vers le 20 mai 2014, la demanderesse signe le Contrat de commission avec la défenderesse, par laquelle la défenderesse convient de verser à la demanderesse une commission pour la vente des produits de climatisation dans l’ensemble du Canada. Le contrat de commission comporte la clause d’arbitrage suivante :
« Article 10: Applicable Law
This Agreement and signature, validity, construction, performance and dispute resolution in connection of this Agreement shall be governed by and interpreted according to this laws and regulation of People’s Republic of China.
Article 11: Dispute Resolution
All disputes caused by or in connection with this Agreement shall be submitted for arbitration to South China International Economic, and Trade Arbitration Commission in accordance with the arbitration regulations of Arbitration Commission. The final arbitration should be conducted by three arbitrators appointed in accordance with the regulations. »
Du 1er avril 2013 au 31 juillet 2014, le total des achats fait par la demanderesse auprès de la défenderesse totalise 7 912 925.94 $ d’où la réclamation de 237 387.78 $ représentant la commission de 3 %.
En 2016, la demanderesse intente sa demande introductive d’instance devant la Cour supérieure du Québec pour réclamer la somme de 237 387.78 $, ce qui représente une commission de 3 %.
Le 20 octobre 2016, la Demande introductive d’instance est signifiée au domicile élu du représentant de la défenderesse au Québec, qui est désigné par celle-ci lors de l’enregistrement de sa marque de commerce au Canada.
Autour du le 18 novembre 2016, le représentant de la défenderesse répond à la demande: « under reserve of all legal objections regarding service and jurisdiction ».
Par la suite, la défenderesse présente une demande en exception déclinatoire fondée sur une clause compromissoire en vertu des articles 167, 169 et 722 C.p.c. La défenderesse allègue que le tribunal doit renvoyer les parties au processus d’arbitrage en Chine.
La question en litige
Quel est l’effet de la clause d’arbitrage en question ?
L’analyse
1. L’article 622 al. 2 C.p.c. prévoit qu’à la demande de l’une des parties, le tribunal saisi d’un litige concernant une question sur laquelle les parties ont conclu une convention d’arbitrage, doit les renvoyer à l’arbitrage, à moins qu’il ne constate la nullité de la convention.
2. Il est bien établi au Canada que toute contestation de la compétence de l’arbitre doit d’abord être tranchée par l’arbitre (Dell Computer Corp. c. Union des consommateurs, 2007 CSC 34). Dans l’affaire Groupon Canada, la Cour d’appel du Québec donne effet à la clause compromissoire parfaite et fait droit au moyen déclinatoire soulevé par la défenderesse. Dans l’affaire Groupon, les parties négocient les modalités financières d’une entente commerciale parce que la demanderesse désire offrir à ses clients, par l’intermédiaire de Groupon, de conduire un véhicule de marque Ferrari pour une durée variant entre 20 et 60 minutes à un prix très avantageux. Selon cette entente commerciale, toutes disputes, controverses ou réclamations en lien avec ou émanant de cet accord, sa négociation, ses effractions, son existence, sa validité et sa fin, doivent être référées à et déterminés par arbitrage à Chicago, Illinois, devant un seul arbitre membre de l’Association Américaine d’Arbitrage, d’où l’arbitrage se fera sans appel. Malgré le fait que la demanderesse ait respecté sa part de l’entente, elle n’a pas reçu les sommes qui se chiffrent à 19 802,61 $ de Groupon. La demanderesse intente son recours devant la Cour du Québec. La Cour du Québec considère que le libellé de la clause d’arbitrage est confuse, ambiguë, abusive et nulle. La Cour du Québec rejette le moyen déclinatoire de la défenderesse. En appel, la Cour d’appel donne effet à la clause d’arbitrage et déclare que c’est l’arbitre qui doit se prononcer sur sa propre compétence et non le tribunal judiciaire (Groupon Canada inc. c. 9178-2243 Québec inc., 2015 QCCA 645).
3. En l’espèce, la demanderesse allègue que le tribunal judiciaire est compétent, parce que la clause d’arbitrage en question n’est pas une clause compromissoire parfaite. Selon la clause d’arbitrage dans le Contrat de commission, les règles et les lois sur l’arbitrage de la Chine, la décision à être rendue par le tribunal d’arbitrage pourrait être annulée si l’exécution de la sentence arbitrale est incompatible avec l’ordre public. Par conséquent, la demanderesse allègue que de son avis, la clause d’arbitrage entre les parties n’est pas une clause compromissoire parfaite parce que la sentence arbitrale rendue ne sera pas finale.
La procureure de la défenderesse argumente qu’il faut se référer à l’intention des parties et réfère au Guide de l’arbitrage sous la direction de Marie-Josée Hogue et Patrick Ferland, ainsi qu’à l’arrêt Zodiak International c. Polish People’s Republic, [1983] 1 RCS 529. En l’espèce, la clause utilise les mots « All disputes caused by or in connection with this Agreement shall be submitted for arbitration […] ». Il s’agit d’une formulation impérative qui ne laisse aucune discrétion aux parties.
Pour les raisons mentionnées ci-dessus, la Cour supérieure du Québec renvoie les parties au processus d’arbitrage à être tenu en Chine.
Par ailleurs, il est à noter que l’allégation audacieuse du procureur de la demanderesse concernant la loi sur l’arbitrage en Chine n’est pas étayée par aucun avis juridique signé par un avocat de la Chine. Il faut rappeler que la sentence arbitrale rendue en Chine sera finale et liera les parties selon l’article 9 de la Loi sur l’arbitrage de Chine. De plus, il faut souligner que le fait que la décision arbitrale puisse être annulée par le tribunal judiciaire de la Chine dans certaines circonstances exceptionnelles, ne signifie pas que la sentence arbitrale ne sera pas finale.
Conclusion : que faut-il retenir?
1. 根据中华人民共和国仲裁法第九条,中国仲裁实行一裁终局的制度。裁决作出后,当事人就同一纠纷再申请仲裁或者向人民法院起诉的,仲裁委员会或者人民法院不予受理。
2. 中华人民共和国民事诉讼法第二百七十四条规定了一些人民法院可以裁定不予执行仲裁裁决的情形。比如, 人民法院如果认定执行仲裁裁决将违背社会公共利益的,人民法院有权裁定不予执行仲裁裁决。中国人民法院对社会公共利益的释义不清晰引起了国际法律界许多学者和律师对中国仲裁制度的不安和疑惑。但这一规定不能否认中国仲裁实行一裁终局的制度。
3. 近年,加拿大魁省法院通过司法判决为社会公共利益对仲裁裁决的执行的影响作了进一步的解析。预知更多关于魁省仲裁裁决执行的案例,请看本站第五十四号博客文 (Perreault c. Groupe Jonathan Benoît, 2021 QCCS 1350)。
(Attention : Le but de cet article est de fournir des informations juridiques générales. Il ne reflète pas l’état du droit de façon exhaustive et ne constitue pas un avis juridique sur les points de droit discutés. Afin de minimiser les risques juridiques pour vos affaires, vous devez demander l’avis juridique d’un avocat sur toute question particulière qui vous concerne. Merci pour votre attention.)